DU RÔLE DES FEMMES DANS L’ART CONTEMPORAIN
Le XXIe siècle voit fleurir des publications sur les femmes artistes[1]. Comment interpréter cet intérêt tout neuf pour une minorité ? L’art contemporain, méconnu et souvent mal aimé, va-t-il enfin trouver, grâce aux femmes, les faveurs du grand public ?
Femmes nues et provocantes (Vanessa Beecroft, Madeleine Berkhemer…), coquettes et amoureuses déçues (Nicole Tran Ba Vang, Sophie Calle…), victimes et prostituées (Marlene Dumas, Bettina Rheims…), etc. Il serait toutefois injuste d’expliquer l’attrait actuel pour les artistes femmes en fonction du degré de voyeurisme ou de misogynie inconsciente qui s’y déploie. Il est préférable d’affirmer que les œuvres des femmes répondent aux mêmes critères de qualité et d’inventivité que celles de leurs confrères hommes et qu’elles s’adressent à tous les publics.
Comme les avant-gardes l’ont démontré, tout matériau possède un coefficient artistique. Cette découverte a permis à des artistes femmes d’employer des techniques « féminines » dans leur travail (broderie chez Ghada Amer, couture chez Annette Messager…).
Les nouvelles technologies sont des outils incontournables dans l’art contemporain en raison de leur capacité à produire des images qui se travaillent facilement et se prêtent à toutes sortes de dispositifs. Les femmes se sont emparées de ces médiums en même temps que les artistes hommes, elles en ont parfois accentué la dimension sonore et intime (Shirin Neshat, Isabelle Lévénez ,Valérie Mrejen…).
Une œuvre contemporaine, en particulier postmoderne, gagne à être référencée à l’histoire de l’art, à dialoguer avec des chefs-d’œuvre du passé. C’est ce que font de nombreuses femmes artistes qui, suivant la théorie critique féministe américaine[2], citent et parodient des œuvres canoniques, dont le repérage procure au public un plaisir immédiat (Orlan, Colette Deblé, Agnès Thurnauer…).
Autre aspect de l’art contemporain : sa volonté d’exister hors du musée. Si les artistes hommes se voient confier la presque totalité des commandes publiques officielles (commémorations), les femmes artistes en profitent pour questionner l’autorité des messages publicitaires à travers des affiches ou des enseignes lumineuses (Tania Mouraud, Jenny Holzer).
Nombreuses sont donc les raisons qui expliquent l’engouement du public et des institutions pour l’art produit par les femmes au XXIe siècle. Par une sorte d’inversion, les femmes délaissent ainsi le statut d’objet du regard pour celui de sujet et se réapproprient la création. Parmi les conséquences de cette nouvelle situation, deux d’entre elles paraissent particulièrement heureuses : 1) il n’existe pas de vieille artiste femme (Louise Bourgeois reste jeune à 96 ans), 2) la proportion d’artistes déprimés est nettement inférieure chez les femmes[3].
Véronique Adnot-Corme
Expositions/
Shirin Neshat Du 8 février au 5 avril Galerie Jérôme de Noirmont 36-38 avenue Matignon Paris
Louise Bourgeois Du 28 mars 2007 au 2 mars 2008 The institute of contemporary art. Boston
Le centre Pompidou fait une rétrospective majeure de Louise Bourgeois à partir du 5 mars 2008.
[1] Femmes artistes/Artistes femmes, éd. Hazan, Élisabeth Lebovici, Catherine Gonnard, 2007 ; Les filles de l’art, Le Monde2 n°192, 20 oct. 2007 ; Femmes artistes : de la Renaissance au XXIe siècle, J. Bartolena et I. Giordano, éd. Hazan, 2007 ; Art’Fab, l’Art / la Femme / l’Europe, Nicolas Bourriaud et alii, éd. P. Terrail, 2006 ; Les femmes artistes dans les avant-gardes, Marie-Jo Bonnet, éd. Odile Jacob, 2006 ; Women artists, femmes artistes du XXe et du XXIe siècle, Uta Grosenick, éd. Taschen, 2005, etc.
[2] Linda Nochlin, Laura Mulvey et Rosalind Krauss.
[3] Dépression et subversion. Les racines de l’avant-garde, Catherine Grenier, 2004, éd. Centre Pompidou, coll. Les Essais ; sur les 121 artistes déprimés cités, seules 7 sont des femmes.
Le XXIe siècle voit fleurir des publications sur les femmes artistes[1]. Comment interpréter cet intérêt tout neuf pour une minorité ? L’art contemporain, méconnu et souvent mal aimé, va-t-il enfin trouver, grâce aux femmes, les faveurs du grand public ?
Femmes nues et provocantes (Vanessa Beecroft, Madeleine Berkhemer…), coquettes et amoureuses déçues (Nicole Tran Ba Vang, Sophie Calle…), victimes et prostituées (Marlene Dumas, Bettina Rheims…), etc. Il serait toutefois injuste d’expliquer l’attrait actuel pour les artistes femmes en fonction du degré de voyeurisme ou de misogynie inconsciente qui s’y déploie. Il est préférable d’affirmer que les œuvres des femmes répondent aux mêmes critères de qualité et d’inventivité que celles de leurs confrères hommes et qu’elles s’adressent à tous les publics.
Comme les avant-gardes l’ont démontré, tout matériau possède un coefficient artistique. Cette découverte a permis à des artistes femmes d’employer des techniques « féminines » dans leur travail (broderie chez Ghada Amer, couture chez Annette Messager…).
Les nouvelles technologies sont des outils incontournables dans l’art contemporain en raison de leur capacité à produire des images qui se travaillent facilement et se prêtent à toutes sortes de dispositifs. Les femmes se sont emparées de ces médiums en même temps que les artistes hommes, elles en ont parfois accentué la dimension sonore et intime (Shirin Neshat, Isabelle Lévénez ,Valérie Mrejen…).
Une œuvre contemporaine, en particulier postmoderne, gagne à être référencée à l’histoire de l’art, à dialoguer avec des chefs-d’œuvre du passé. C’est ce que font de nombreuses femmes artistes qui, suivant la théorie critique féministe américaine[2], citent et parodient des œuvres canoniques, dont le repérage procure au public un plaisir immédiat (Orlan, Colette Deblé, Agnès Thurnauer…).
Autre aspect de l’art contemporain : sa volonté d’exister hors du musée. Si les artistes hommes se voient confier la presque totalité des commandes publiques officielles (commémorations), les femmes artistes en profitent pour questionner l’autorité des messages publicitaires à travers des affiches ou des enseignes lumineuses (Tania Mouraud, Jenny Holzer).
Nombreuses sont donc les raisons qui expliquent l’engouement du public et des institutions pour l’art produit par les femmes au XXIe siècle. Par une sorte d’inversion, les femmes délaissent ainsi le statut d’objet du regard pour celui de sujet et se réapproprient la création. Parmi les conséquences de cette nouvelle situation, deux d’entre elles paraissent particulièrement heureuses : 1) il n’existe pas de vieille artiste femme (Louise Bourgeois reste jeune à 96 ans), 2) la proportion d’artistes déprimés est nettement inférieure chez les femmes[3].
Véronique Adnot-Corme
Expositions/
Shirin Neshat Du 8 février au 5 avril Galerie Jérôme de Noirmont 36-38 avenue Matignon Paris
Louise Bourgeois Du 28 mars 2007 au 2 mars 2008 The institute of contemporary art. Boston
Le centre Pompidou fait une rétrospective majeure de Louise Bourgeois à partir du 5 mars 2008.
[1] Femmes artistes/Artistes femmes, éd. Hazan, Élisabeth Lebovici, Catherine Gonnard, 2007 ; Les filles de l’art, Le Monde2 n°192, 20 oct. 2007 ; Femmes artistes : de la Renaissance au XXIe siècle, J. Bartolena et I. Giordano, éd. Hazan, 2007 ; Art’Fab, l’Art / la Femme / l’Europe, Nicolas Bourriaud et alii, éd. P. Terrail, 2006 ; Les femmes artistes dans les avant-gardes, Marie-Jo Bonnet, éd. Odile Jacob, 2006 ; Women artists, femmes artistes du XXe et du XXIe siècle, Uta Grosenick, éd. Taschen, 2005, etc.
[2] Linda Nochlin, Laura Mulvey et Rosalind Krauss.
[3] Dépression et subversion. Les racines de l’avant-garde, Catherine Grenier, 2004, éd. Centre Pompidou, coll. Les Essais ; sur les 121 artistes déprimés cités, seules 7 sont des femmes.
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